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CES PHRASES QU’ON NE DEVRAIT JAMAIS TE DIRE (et que tu ne devrais jamais te dire à toi-même).

Il y a une chose qui me rend vraiment heureuse par rapport aux sciences, c’est qu’elles sont en constante évolution. Donc la première affaire que j’aimerais te dire, c’est qu'il n'y a JAMAIS rien de coulé dans le béton. Oups, j’ai dit jamais. « Il ne faut jamais dire jamais ». Vous connaissez l’adage?


Aujourd’hui je veux te parler de l’effet nocebo. Tu as sûrement déjà entendu parler de l’effet placebo, son p’tit chum bien positif qui fait que même si tu prends une pilule de sucre, ça se pourrait que ça marche pareil? L’effet nocebo, c’est l’inverse. C’est toutes ces choses qu’on dit, qu’on pense ou qu’on fait, et qui ont un effet que j’oserais appeler « contre-productif ».



Ce qu’il faut commencer par comprendre, c’est que le cerveau est une machine fort complexe et absolument fascinante, si tu veux mon avis. On découvre à peine l’étendue de son potentiel, à une époque où la science va pas mal plus vite que grand-maman sur son vélo électrique. Pour illustrer la force de notre psyché, voici quelques exemples inusités tirés d’études scientifiques (mais vous pouvez vous-mêmes en ressentir les effets, probablement). On a réussi à démontrer que penser vraiment fort à un citron augmentait significativement la production de salive. On a réussi à démontrer que penser vraiment fort à mettre sa main dans la glace pouvait diminuer la perception de douleur. Quand quelqu’un te raconte une histoire qui implique du vomi, ça arrive que ça te donne un peu mal au cœur, non?


Bon, ceci étant dit, il y a des phrases qu’on ne devrait jamais te dire, et que tu ne devrais jamais te dire à toi-même non plus. Les premières sont faciles; c’est celles qui impliquent quelque chose de pas cool + les mots « toujours » ou « jamais ».

Genre:

- « Quand j’essaie quelque chose de nouveau, je ne réussis JAMAIS. »

- « Chaque fois que j’essaie de faire quelque chose pour aller mieux, c’est TOUJOURS un échec. »

- « J’ai TOUJOURS mal quand j’essaie de m’activer ou de bouger. »

- « Je n’arrive JAMAIS à me motiver à finir ce que je commence. »


Relis-les. Ça sonne mal, non? Ça ne commence pas bien si tu pars avec cette idée-là, non? C’est la règle numéro 1 de l’effet nocebo. Plus ton cerveau est convaincu de quelque chose de négatif, plus les affaires se mettent en place pour lui donner raison.


Super, une bonne chose de réglée. Ensuite il y a les phrases (avec ou sans ces 2 mots bannis) qui te sont dites par des professionnels de la santé (qui manquent un peu de délicatesse ou d’alternatives), ou par tes ami.e.s/tes proches/une connaissance éloignée qui pense savoir de quoi elle parle. Je suis physiothérapeute, et voici des phrases que je n’utilise jamais dans mes communications avec les gens que j’accompagne :


- « Tu ne pourras plus jamais courir/sauter/faire ce mouvement. »

- « Ce mouvement est vraiment dangereux, attention. »

- « Dans ta situation, c’est impossible d’envisager que cela fonctionne. »

- « Si tu penses que ta situation n’a pas d’allure, attends de voir plus tard. »

- « Ton dos est fini/tellement magané/est celui d’une personne de 80 ans. » (wtf?)

- « Je ne serais pas surprise que ça demeure problématique à long terme. »

- « Ta condition est une bombe à retardement. »

- « C’est de l’arthrose, y’a rien que je peux faire pour t’aider. »

- « T’es chanceux, ça pourrait vraiment être pire. »

- « Les gens qui ont le même genre de condition que toi n’ont pas un bon pronostic en général. »


Ça, et tous les mots à connotation négative un peu trop imagée pas du tout réaliste du genre: « vertèbre déplacée, bassin désaligné, épaule maganée, posture problématique, douleur chronique, etc. ». Juste les lire, moi ça me fait mal. Pour quelqu’un qui vit avec une problématique de santé, c’est encore pire. Il y a peut-être de ces phrases que tu trouves un peu intenses ? Pourtant, c’est chose courante et il faut que ça change.


Voici quelques pistes de solutions. Tout d’abord, concernant ton corps, sache que les kilomètres derrière toi, les expériences, les essais et les erreurs, les accomplissements et les dépassements dont tu es le plus fier, c’est ça qui compte. Ton corps, il est fait pour bouger, progressivement c’est sûr, mais pour longtemps et de belle façon. C’est très peu probable qu’il n’y ait « rien à faire ». C’est sûr qu’on n’a pas de baguette magique, mais tu sais quoi? La capacité du corps de trouver des alternatives, si on l’aide un petit peu, c’est presque de la magie. Et il y aura toujours des façons d’adapter les activités pour tenir compte de tes capacités et de trouver des nouvelles façons de bouger de façon satisfaisante. C’est chouette, non?


Pour ce qui est des stratégies de communication anti-nocebo, voici ce que je te propose:

- Au lieu d’utiliser les mots «toujours» et «jamais» pour illustrer ta peur de l’échec ou de la nouveauté, utilise plutôt la formulation: « jusqu’à maintenant ». Dire que tu n’as pas réussi à trouver la formule gagnante pour t’activer durablement, jusqu’à maintenant, ça ouvre la porte à la possibilité au lieu de te placer en position de vulnérabilité dès le départ.


- Au lieu de mettre l’accent sur ta douleur (ou quand les professionnels te demandent à combien /10 tu as mal…), imagine plutôt la situation en termes de confort. Par exemple, noter ton confort actuel à 8/10 te permet de te demander: qu’est-ce que je pourrais faire pour être mieux? C’est souvent plus facile de trouver des pistes de solution à l’inconfort qu’à une douleur.


- Les éléments d’une communication anti-nocebo devraient mettre l’accent sur des concepts-clé en lien avec les besoins psychologiques de base de l’être humain. Le fait de se sentir accompagné, confortable, d’avoir les informations adéquates et un sentiment de contrôle sur ce qui se passe, d’avoir des instructions claires, de se sentir respecté et en sécurité, et de sentir qu’on prend soin de soi devrait être une priorité.


Donc avec tout ça, je t’invite à t’offrir beaucoup de douceur, à donner du sens à toutes les étapes de ton super parcours, à respecter tes limites et à dépasser celles que les autres t’imposent, et d’une façon un petit peu philosophique et pas scientifique pantoute: entoure-toi de gens qui te font pétiller les yeux, avance un pas à la fois et amuse-toi!

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Sources :

Zech N, Seemann M, Grzesiek M, Breu A, Seyfried TF and Hansen E (2019) Nocebo Effects on Muscular Performance – An Experimental Study About Clinical Situations. Front. Pharmacol. 10:219. doi: 10.3389/fphar.2019.00219 Hansen E and Zech N (2019) Nocebo Effects and Negative Suggestions in Daily Clinical Practice – Forms, Impact and Approaches to Avoid Them. Front. Pharmacol. 10:77. doi: 10.3389/fphar.2019.00077

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